Patrimoine wallon
Démarrage de la nouvelle « Alliance Patrimoine-Emploi »
Ce 12 novembre 2025 se donnera le coup d’envoi, à la Paix-Dieu à Amay, de la nouvelle « Alliance Patrimoine-Emploi » 2.0 issue d’un partenariat étroit entre les autorités wallonnes et les acteurs privés du patrimoine, dont le secteur de la construction. Avec l’ambition de répondre aux nombreux défis du patrimoine wallon.
Quelques rétroactes : colloque de Fosses et DPR
Le 18 février dernier, un colloque organisé par Embuild Wallonie et l’Union wallonne des architectes (UWA) à Fosses-la-Ville mettait en lumière l’importance du secteur du patrimoine comme levier d’activité économique en Wallonie : 50000 biens repris à l’inventaire du patrimoine immobilier dont 4200 classés, 350 entreprises de construction agréées D23 ou D24… (cfr Embuild Magazine d’avril). Lors de ce colloque, Embuild Wallonie, en tandem avec le Groupement professionnel de la restauration du patrimoine (GPRP) de la Fédération des entrepreneurs généraux de la construction, avait présenté son mémorandum « patrimoine » et avait plaidé pour la relance de l’Alliance Patrimoine-Emploi de 2016 qui contenait de nombreuses résolutions (à raviver) en matière de formation, de modes de financement et d’organisation des marchés publics en matière de patrimoine, notamment pour soutenir et faciliter l’accès des PME aux marchés concernés. L’Association royale des demeures historiques et jardins de Belgique (ARDHJB) avait également émis, au colloque de Fosses, des idées très concrètes (et d’ailleurs très convergentes avec les positions des constructeurs) comme l’adoption en Wallonie du « monumentenwacht » ainsi que l’exonération des droits de succession et de donation à étendre aux dépendances non-classées, ou encore l’amélioration des clauses techniques en marchés publics et privés. Ces appels entrent en résonance avec la Déclaration de Politique régionale (DPR) 2024 du nouveau Gouvernement wallon qui appelle à déployer des « alliances stratégiques » en patrimoine impliquant notamment les secteurs de la construction, de la formation, de la culture et du tourisme. En conclusion du colloque de Fosses, la ministre du patrimoine, Valérie Lescrenier, avait donc exprimé sa forte volonté de collaboration avec les parties prenantes, notamment pour renforcer la formation des acteurs, faciliter les financements alternatifs, ainsi que poursuivre l’optimisation de l’Agence wallonne du patrimoine (AWaP) et du Code du patrimoine (CoPat).
Astres alignés pour une « Alliance Patrimoine-Emploi » 2.0
Dans la foulée de ce colloque, les astres étaient donc alignés entre acteurs publics et privés pour relancer la dynamique de l’Alliance patrimoine-emploi. Après une évaluation de sa version 2016, mais également au vu des évolutions du contexte juridique et économique depuis lors, il est apparu nécessaire au Gouvernement wallon d’actualiser la démarche par le lancement d’une nouvelle Alliance Patrimoine-Emploi 2.0. Les besoins identifiés en 2016 – à savoir la stimulation de l’emploi et de la formation dans la construction, l’amélioration de la qualité sur les chantiers patrimoniaux et la diversification des sources de financement – sont toujours d’actualité, mais de nouveaux besoins sont venus s’y rajouter vu l’évolution des enjeux sociétaux :
- Les enjeux énergétiques, qui doivent être intégrés aux projets de rénovation ;
- La nécessité d’une réaffectation viable économiquement comme levier de pérennisation du patrimoine ;
- L’amélioration de l’efficience et de l’orientation « usager » de l’AWaP, devant mieux jouer son rôle de facilitateur ;
- L’entrée en vigueur (à autopsier et optimiser) du nouveau CoPat ;
- L’implication accrue du secteur privé.
Quatre tables-rondes à organiser d’ici un an
C’est sur cette base que le Gouvernement wallon, à l’initiative du cabinet de V. Lescrenier, a élaboré le programme de l’Alliance Patrimoine-Emploi 2.0 autour de quatre tables rondes à organiser d’ici fin 2026 par l’AWaP et les organismes publics compétents, en concertation avec les différents partenaires privés concernés, au premier rang desquels Embuild Wallonie/GPRP, l’UWA, l’ARDHJB et plusieurs autres non moins stratégiques (Buildwise, Prométhéa, Constructiv, UPSI…).
La table-ronde n°1, consacrée au thème « Emploi, formation, promotion des métiers du patrimoine », se déroulera ce 12 novembre à la Paix-Dieu à Amay. Les métiers liés à la restauration mobilisent des savoir-faire spécifiques, souvent rares, qui s’acquièrent surtout par une formation approfondie et/ou une transmission intergénérationnelle. Ces compétences sont aujourd’hui sous pression, vu les pénuries de profils qualifiés (maçons, couvreurs, gestionnaires de chantier…). Notre secteur souhaite donc renforcer l’offre de formation (initiale et continue) via plusieurs leviers : formation en alternance et en entreprise (notamment le tutorat), partenariats entre centres de formation et entreprises, parcours de formation continue adaptés à la saisonnalité des activités, sans oublier de renforcer les compétences des formateurs… En outre, le secteur recommande d’intégrer dans les marchés publics des critères qualitatifs valorisant l’expérience, les références et les compétences des opérateurs, et plaide pour poursuivre les campagnes d’attractivité des métiers techniques.
En mars, la table-ronde n°2 abordera les aspects économiques et financiers. Outre le renforcement des effets-levier entre tourisme, culture et patrimoine, on y évoquera le potentiel des financements alternatifs. D’une part pour la reconversion de biens patrimoniaux en lien avec les professionnels du secteur immobilier (moyennant une réévaluation éventuelle du corpus des biens classés pour accélérer et faciliter les process). D’autre part pour étendre à de nouveaux types de biens les dispositifs fiscaux d’exonération conditionnée des droits de succession et de donation… Et « last but not least » pour stimuler le mécénat, avec l’expertise de Prométhéa…
En juin, la table-ronde n°3 étudiera les aspects techniques, l’énergie et la durabilité. On y présentera le Monumentenwacht (dispositif qui fonctionne bien aux Pays-Bas et en Flandre pour l’analyse des besoins d’entretien préventif et de restauration des biens) et les aides au diagnostic. On réfléchira (avec l’appui de Buildwise) à l’intégration adéquate de la dimension énergétique et de la PEB dans les restaurations, à l’amélioration des clauses techniques et cahiers des charges, à l’arrivée de nouveaux matériaux et d’innovations techniques, à l’intégration de l’intelligence artificielle dans les process…
Enfin, à l’automne prochain, la table ronde n°4 abordera les marchés publics et privés du patrimoine, en visant d’améliorer l’accessibilité des PME aux marchés publics, la qualité des clauses administratives et techniques, l’équilibre des références de bonne exécution, la pratique des pièces d’épreuve, les critères d’attribution pour valoriser le savoir-faire des entreprises spécialisées locales… Du côté des marchés privés, on évaluera si le nouveau CoPat stimule et accélère la commande de travaux pour les propriétaires privés par ses nouveaux dispositifs (procédures simplifiées et accélérées, fixation de délais maximum, simplification des demandes de subventions…).
Vu l’ampleur de la matière, les actions seront sans doute priorisées pour chaque thématique… Votre magazine reviendra dans ses futures éditions sur les conclusions des tables rondes et de cette Alliance Patrimoine-Emploi 2.0.